EDSNBlog → L’IA dans les écoles, l’urgence d’une prise de conscience collective.

L’IA dans les écoles, l’urgence d’une prise de conscience collective.

9 octobre 2025

En quelques mois, l’intelligence artificielle est passée du statut de gadget attrayant à celui d’assistant omniprésent dans les salles de classe, tant auprès des enseignants que dans les devoirs des élèves. Et si l’enthousiasme est légitime, il est nécessaire de rappeler une évidence. Celle que l’IA n’est pas une baguette magique. Elle ne remplacera ni l’effort dans les apprentissages, ni le rôle fondamental des enseignants et encore moins le développement des compétences humaines fondamentales.

Illustration présentant un groupe collaborant devant un ordinateur

L’IA, un outil fascinant, mais pas une fin en soi.

Les outils d’IA peuvent adapter les contenus, ajuster les rythmes d’apprentissage ou encore proposer des exercices ciblés. Ces outils offrent un potentiel indéniable pour soutenir la différenciation pédagogique et aider les élèves à progresser selon leurs besoins.

Mais réduire l’enseignement à une série d’interactions homme-machine est une erreur. L’apprentissage, c’est aussi la frustration, l’échec, la coopération, la curiosité. Autant d’expériences que l’IA ne vit pas et ne peut pas nous aider à expérimenter. Chaque élève a besoin de ces expérimentations pour vivre et grandir. Les compétences douces (soft skills) que sont la communication, l’esprit critique, la créativité ou encore l’empathie et la capacité à se motiver ne se téléchargent pas. Elles se développent, patiemment, lentement, d’humain à humain.

Données, biais et illusions, des zones d’ombres qui ne doivent pas être négligées.

Derrière les performances évidentes des IA se cachent des questions majeures trop rarement abordées. D’où viennent les données d’entraînement ? Que deviennent celles des élèves ? Quels biais sont transmis — parfois inconsciemment — à travers ces systèmes ?

Ces modèles probabilistes que sont les IA apprennent à partir de corpus immenses de données, mais trop souvent opaques. Cette « obscurité des données » peut amener à renforcer les stéréotypes de genre, de culture ou de religion. Imaginez la quantité de données astronomique qu’une IA a pu lire durant son entraînement ne serait-ce que sur la Seconde Guerre mondiale et les idées qui y étaient véhiculées ? 🤯 Les IA produisent aussi et souvent des contenus erronés, appelés « hallucinations ». Un cas particulièrement problématique dans un contexte éducatif où la fiabilité de l’information a clairement son importance.

Le risque de fracture éducative

Quant à la question de la fracture numérique, je vois certaines écoles bien équipées explorer l’IA de manière innovante. Mais la plupart, faute de moyens techniques et de formations, en restent éloignées. À terme, cette inégalité d’accès pourrait accentuer les écarts entre établissements et accroitre encore davantage les inégalités sociales.

L’introduction de l’IA à l’école ne doit pas être un luxe optionnel, mais une nécessité. Une nécessité accompagnée d’une réflexion éthique, pédagogique et sociale.

L’IA comme pivot pédagogique, pas comme moteur unique

L’IA a le potentiel d’être un pivot pédagogique sans précédent, un levier de « croissance pédagogique » certainement le plus sûr que l’école puisse actuellement posséder. Mais elle ne doit en aucun cas devenir un substitut à l’effort scolaire ni l’alibi d’un apprentissage facilité.

Apprendre, c’est aussi se tromper, douter, recommencer. C’est construire du sens, pas simplement consommer des réponses toutes faites.

Vers une IA locale, éthique et souveraine

Heureusement, des alternatives existent. L’une d’elles, que je présente et intègre activement dans les établissements scolaires, est l’usage local de l’IA. Des solutions comme Mistral (solution européenne) ou Apertus (solution suisse) permettent de déployer des IA localement, dans l’école, avec des ressources informatiques à moindre coût. Pas de transfert de données, pas de serveurs extérieurs, pas de compte, pas d’abonnement, pas de collecte de données. Une alternative plus sûre, plus respectueuse de la vie privée et plus adaptée aux besoins réels des établissements.

Les écoles peuvent utiliser des modèles ouverts, configurés et paramétrés en interne pour créer un environnement d’apprentissage confidentiel, éthique et durable. Une forme d’équilibre entre innovation et responsabilité.

Former les esprits, pas les algorithmes

L’école d’aujourd’hui n’a plus la mission de former des exécutants. Elle doit aujourd’hui former des penseurs. Or, l’IA, mal comprise et mal encadrée, risque de transformer l’élève en consommateur de savoir plutôt qu’en constructeur.

Former à l’IA, oui. Mais surtout, former avec discernement. Enseigner aux élèves pourquoi le métier d’élève est important, comment utiliser l’IA, la questionner, la contredire. L’esprit critique reste notre meilleure forme d’intelligence.

Je suis le premier à dire que l’intelligence artificielle est une formidable opportunité. Mais pour qu’elle serve réellement à l’éducation, elle doit rester un outil, pas un maître. C’est à nous, enseignants, parents, institutions, de poser le cadre. D’ouvrir le débat et d’assurer que cette révolution reste humaine avant tout.

Car l’avenir de l’école ne se code pas. Il se construit. Tous ensemble.


intelligence artificielleéducationécoleapprentissagepédagogiecompétences douceséthique numériquebiais algorithmiquesdonnées personnellesfracture numériqueinnovation éducativeenseignementtechnologiesouveraineté numériqueApertusMistralopen sourcetransformation pédagogiqueenseignement responsableéthique de l'IA